Description
Khrone est un monde entièrement souterrain. La vie s’y développe grâce à l’éclat d’un puissant cristal, permettant à de formidables civilisations, dont l’Empire shaari, de s’y épanouir.
Asia est une gladiatrice prometteuse de l’Empire. Mais elle n’est pas une simple combattante. Elle enfile un manteau d’aristocrate en sortant de l’arène pour se mêler aux hautes sphères politiques, dans le but de retrouver celui qui l’a trahie. Et de lui faire payer.
Cependant, l’arrivée soudaine de la Dame du Nord, souveraine du lointain peuple des elfes noirs, va bouleverser ses plans. Car cette puissante sorcière semble cultiver un vif intérêt pour Asia. Mais qu’est-ce qu’une reine étrangère versée dans la magie noire peut bien lui vouloir ? Et si c’était elle qui détenait les clefs du passé d’Asia, et qui lui permettait d’assouvir enfin sa vengeance ?
Genres :
Sujets :
- Histoire
- Société
- Aventure
- Périple
- Univers temporel
- Médiéval
- Courage
- Guerre
- Univers parallèles
- Vengeance
- Assassin
- Banshee
- Bataille
- Centaure
- Combat
- Divinité
- Dragon
- Elfe
- Esprit
- Fantôme
- Géant
- Gobelin
- Héro·ïnes
- Imagination
- Magie
- Monstre
- Nain
- Ogre
- Ombre
- Spectre
- Troll
- Zombie
- Pouvoir magique
- Sorcellerie
- Sortilège
Publics :
Métier :
Écrits
(1)
Extrait - Chapitre 1 Lire l'intégralité de Chapitre 1 (Extrait)
Dernière modification le 30/05/2018Chapitre 1
Le combat est une question d’équilibre et de grâce. Nul besoin de force pour triompher. Le combat est un art. A l’image du souffleur de verre ciselant patiemment sa création, ou du poète faisant se chevaucher les mots dans une danse endiablée, le combattant modèle sa bataille pour en faire une œuvre. Quelque chose de graphique, de mélodieux, d’uni et d’harmonieux. Quelque chose de beau.
Salvin’Yran Tombevoile, Mémoires d’un autre temps
Valaria esquiva le coup d’une élégante courbette assortie d’un salto arrière parfaitement exécuté.
Son adversaire était coriace.
Bâti comme une montagne et solide comme du granit, Phaâl Empor n’en était pas moins d’une agilité déconcertante. Croisement incongru d’un troll des cavernes avec un humain, son faciès était d’une repoussante laideur qui n’en finissait pas de perturber la jeune femme.
Quel comble pour elle qui se considérait comme un modèle de grâce.
Non pas que les gladiateurs qu’elle avait l’habitude d’affronter fussent d’une irréprochable beauté, mais celui-ci était particulièrement moche.
Ses yeux étaient beaucoup trop rapprochés, et son front proéminent lui donnait un air faussement sauvage qu’elle trouvait ridicule. Sans parler de la disproportion tout bonnement absurde de ses membres.
Une offense à la nature, de toute évidence.
Par ailleurs, il bougeait vite, et se battait avec l’adresse que procuraient de longues années d’entrainement. Il n’avait pas fait l’erreur de s’équiper d’une longue et lourde arme d’hast qui l’aurait précipité vers une mort aussi rapide que certaine. C’était pourtant la méprise commise par bon nombre d’ennemis de Valaria. Ils jugeaient à tort qu’ils pouvaient la dominer par la force brute, et en souffraient les terribles conséquences.
Celui-là avait plutôt opté pour une courte épée au tranchant féroce et un bouclier massif parfaitement adapté aux mouvements vifs de Valaria.
Ce n’était pas pour rien qu’il était l’un des meilleurs gladiateurs de Khrone.
Il chargea à nouveau en feintant au dernier moment. Valaria commençait enfin à s’habituer à son style de combat.
Elle réagit instantanément.
Pivot, saut sur la droite, bond en arrière.
Elle arrivait à grand-peine à faire abstraction du physique disgracieux de son adversaire. Et pourtant, elle avait connu un paquet de monstres. Des petits, des grands, des gros. Certains s’étaient montrés doux, d’autre moins. Tous étaient tombés sous sa lame impitoyable.
Concentration.
Nouvel assaut.
Phaâl Empor leva son arme.
Une frappe décisive, violente, impossible à éviter.
Valaria roula sur le côté à l’ultime seconde et le glaive se ficha dans le sable.
Un mugissement assourdissant résonnait dans l’arène à chaque coup porté ; la foule était partagée entre excitation et appréhension. C’était du grand spectacle.
Au milieu de l’amphithéâtre, la jeune femme n’en menait pas large. Acculée contre un mur, elle n’entendait rien des cris des spectateurs.
Et pour cause : elle était entièrement focalisée sur les mouvements de son adversaire, et ne pouvait s’offrir le luxe d’une distraction qui lui serait fatale. Elle n’en n’avait d’ailleurs même pas l’idée. Ses deux fines dagues étaient prêtes à jaillir au moindre geste de Phaâl Empor pour offrir une parade à ses attaques mortelles.
Au vu de son positionnement actuel, ses possibilités d’action s’amenuisaient de seconde en seconde. Le mur était un bon allié contre un groupe d’ennemis, mais se révélait le pire des traîtres en duel face-à-face. Il fallait agir vite.
Elle se faufila derrière lui avec la vivacité d’un serpent et lui porta un coup à la gorge, qu’il évita de justesse.
Manqué.
Repli stratégique.
Il était moins une, la lame du gladiateur passa à un cheveu de sa nuque.
Elle commençait à douter de la tactique qu’elle mettait en place depuis le début du combat, qui consistait à fatiguer lentement son adversaire en s’exposant dangereusement à ses coups pour feinter à l’ultime seconde.
Elle aimait bien combattre les gros mastodontes. Ces guerriers à l’aspect brutal et massif étaient d’habitude aisés à défaire ; leurs muscles constituaient une barrière infranchissable en début de combat, mais devenaient rapidement un handicap à mesure que leur masse corporelle leur pesait – c’était le cas de le dire – et ils s’affaiblissaient peu à peu. Jusqu’au moment où Valaria perçait leur défense, et se mettait à jouer avec eux comme s’ils n’étaient plus que de vulgaires marionnettes de bois.
Celui-ci était toutefois doté d‘une endurance exceptionnelle, et puisait dans des ressources qu’elle n’aurait pas soupçonnées, ce qui lui compliquait considérablement la tâche. Et, prise à son propre jeu, elle se mettait elle-même à fatiguer.
Elle savait qu’elle ne tarderait pas à commettre une faute inévitable.
Comme pour confirmer ses pensées, alors qu’elle évitait de justesse un coup de taille, elle aperçut, trop tard, le bouclier d’Empor s’abattre sur son poing gauche. Sa dague décrivit une courbe parfaite dans le ciel et alla se ficher dans le sable à dix mètres de là, parfaitement verticale, tandis qu’elle s’écrasait au sol sous la violence du choc. Sa vision se troubla alors que son ennemi lui assénait un brutal coup de pied dans les côtes.
Pas si agréable de croiser le fer avec une brute.
En suffocant, elle vit son épée se diriger droit vers son front, et ferma les yeux.
Surgies d’un autre âge, les paroles de son ancien maître résonnèrent dans sa tête, comme en écho aux longues séances d’entraînement qu’elle avait subies.
« La paix est la gardienne des émotions. Celui qui est apaisé ne pourra jamais être atteint par les paroles ou actes qui cherchent à le blesser. Il en est de même dans un duel. Celui qui panique est perdu dès le début du combat, parce qu’il n’est pas maître de sa propre personne. Si peu d’hommes sont de redoutables combattants, jeune élève, c’est parce que se comprendre est extrêmement ardu. C’est l’un des objectifs les plus complexes d’une vie de guerrier. Beaucoup n’y arrivent d’ailleurs jamais. Pourtant, c’est la clé de tout. Car comment peut-on vouloir maîtriser un combat lorsque l’on ne sait se maîtriser soi-même ? »
L’arme se planta dans le sol avec un bruit sourd.
La fille s’était envolée.
Bras écartés, jambes tendues, son saut était impressionnant de grâce et d’équilibre. Se riant de la pesanteur, Valaria avait bondit en une fraction de seconde pour aller toucher le ciel. Pendant un instant, le temps se figea dans l’arène.
Lorsqu’elle retomba souplement au sol derrière son adversaire, la foule poussa une immense acclamation.
Phaâl Empor était fort de longues années d’expérience, et comprit immédiatement qu’il n’aurait pas le temps de récupérer son arme et de se retourner. Il choisit donc de faire directement volte-face en brandissant son bouclier devant lui pour encaisser la prochaine attaque de la jeune femme.
Elle ne lui offrit pas ce plaisir, mais le gratifia d’un regard méprisant à la place. Elle se tenait immobile à quelques pas, et se contentait de le toiser froidement. Phaâl Empor arqua un sourcil, déconcerté.
Ce n’est que lorsqu’elle leva le bras qu’il comprit son erreur.
Fatale.
Deux étoiles de métal acérées jaillirent du sable derrière ses pieds et filèrent rejoindre la main de leur détentrice, sectionnant au passage ses chevilles avec un bruit sec.
Il hurla de douleur.
Trop sûr de lui, il avait fait confiance à son expérience et n’avait pas jugé objectivement le combat. Même si c’était ainsi qu’il avait toujours gagné. Il avait cru à une victoire facile sur un adversaire épuisé, et en avait payé le prix fort.
Son bouclier chut à ses pieds, et il tomba à genoux.
Phaâl Empor se savait condamné. Il connaissait les règles. Laisser un ennemi en vie après une victoire était un signe de faiblesse à Khrone. Perdre un combat et en réchapper était encore pire. Il accepta stoïquement son sort lorsque Valaria posa sa lame contre son cou, et planta son regard dans le sien. Ce qu’il y lut lui glaça le sang. Une détermination cruelle se reflétait au cœur de deux iris acérés.
Il en avait connu, des combats. Il n’avait jamais fait preuve de pitié. Et il n’avait jamais perdu ses moyens. Après des dizaines d’années de bataille, il avait éliminé tout état d’âme. Il était devenu une machine à tuer sans âme.
Mais devant ce regard, Phaâl Empor frissonna.
Ce fut son dernier geste.
***
Dans les quartiers de sa maîtresse, Valaria s’appliquait à ôter son équipement, une combinaison de cuir particulièrement souple qui lui collait si bien à la peau que lorsqu’elle se battait, elle n’avait même pas l’impression d’être habillée. Et pourtant, c’était une protection redoutable. On lui en avait fait cadeau jadis, et elle ne s’en était jamais séparée. Elle ne s’estimait pas matérialiste, mais s’il y avait quelque chose auquel elle était attachée, c’était son équipement. Il portait une trop grande valeur sentimentale.
Elle posa délicatement la combinaison et se dirigea vers la salle de bain, perdue dans ses pensées. Au final, le combat avait été relativement facile. Une petite ruse pour tromper l’ennemi et un piège savamment ficelé avaient été, comme à l’accoutumée, la recette de la victoire. Rien de bien neuf là-dedans.
Mais gagner n’avait plus la même saveur qu’auparavant. Il y manquait quelque chose. L’euphorie consécutive à ses premiers succès s’était dissipée, et elle exécutait désormais ses adversaires avec froideur et méthode.
Elle se rappela son premier combat.
Le minotaure qu’elle avait défié ce jour-là était le plus puissant combattant des jeux. D’une stature colossale, haut de plus de deux mètres, il captivait son public par son absence totale d’humanité. Son plaisir ultime était le massacre de victimes innocentes, bien qu’il trouve tout autant son bonheur dans les batailles professionnelles que lui proposaient les jeux. Invaincu, il était maître de l’arène de Val’Hashar dans laquelle elle avait fait ses débuts, et Valaria n’aurait jamais dû l’affronter.
Seulement, pleine d’ambition, elle n’avait pu se retenir de l’insulter publiquement après qu’il l’eut poussée sans ménagement et avec dédain, ce qui valait pour une provocation en duel en règle.
Quelques jours plus tard, elle mordait la poussière sous les coups de la bête enragée. Acculée et désarmée, elle avait fini par se résigner à la mort, réalisant qu’elle avait joué avec le feu, et avait perdu. Ce fut le regard fixé dans les yeux goguenards du minotaure qu’elle avait compris.
On ne gagnait pas en abandonnant. On gagnait en s’accrochant, avec une volonté de fer.
La volonté de réussir.
De vivre.
De gagner sur soi-même.
La clé de la victoire.
Elle avait au dernier instant arraché les yeux de son adversaire alors qu’il se penchait lubriquement sur elle, et l’avait mis à mort sauvagement avec sa propre arme dans un effroyable bain de sang. Elle avait jubilé, savouré cet instant de toute-puissance, où l’autre est à sa merci lorsque son monde s’écroule en un instant sans qu’il ne comprenne comment.
Après, de victoire en victoire, son parcours l’avait guidé jusqu’aux grandes arènes de Shar’Hakem dans lesquelles elle versait le sang depuis quelques mois. Son but final était celui de tout bon gladiateur : combattre dans la Grande Arène impériale puis passer l’Epreuve du Champion, consécration de cette vie de combat. Elle avait d’ailleurs enfin été conviée à la Grande Arène, dans une dizaine de jours. Elle s’y préparait lentement.
Néanmoins, Valaria n’était plus satisfaite par cette existence. Sa vie avait trouvé un sens dans un dangereux jeu de cache-cache avec la mort après les traumatismes de sa jeunesse, mais les cauchemars qui la hantaient à cette époque ressurgissaient peu à peu, accompagnés de sombres désirs de vengeance.
Elle alla s’allonger dans un bain, ses pensées dérivant au fil de l’eau. Doucement, elle se laissa sombrer dans un sommeil troublé de mauvais rêves