Description
14 textes à la mémoire du sergent Bertrand. Ces fictions, imprégnées de l'univers macabre d'Edgar Allan Poe, dressent un portrait fasciné du «vampire de Montparnasse», qui déterra et viola de nombreuses femmes dans les cimetières parisiens au milieu du XIXe siècle.
Extrait :
En ce soir d'octobre 1849, il se souvenait de la chasse à l'homme qui lui avait causé tant de nuits blanches. Il se frottait les mains d'avoir jeté en prison ce criminel d'un genre nouveau. Depuis deux ans, des cas d'exhumation avaient été recensés dans des cimetières de France. L'imagination populaire avait d'abord attribué ces actes à un anti-nécropolien, mais il n'y avait aucune raison d'agir ainsi, c'eût été contre-productif. Alors, très vite, on y avait vu la dépravation d'un vampire venu sucer le jus des morts. Les manchettes des journaux avaient titré: «Gare au Vampire de Montparnasse!» Les femmes restaient cachées chez elles. On avait peur, dans les chaumières, que le vampire vînt se repaître d'un sang neuf dont il raffolerait. Creuser la terre ne suffisait pas au scélérat. Il n'avait rien non plus de ces pilleurs de sarcophages, avides de trouver des trésors. Son plaisir se nichait dans les recoins d'une âme vicieuse: il fouillait les fosses communes à la recherche d'un cadavre fraîchement enterré. On n'avait pas osé imaginer ce qu'il faisait avec ces femmes, mais le champ de bataille qu'il laissait au matin était des plus abjects?: les mortes avaient le ventre ouvert, les membres découpés et les cuisses fendues. L'homme ne prenait pas la peine de les enfouir une fois son forfait accompli. Il laissait au grand air, pour le plaisir des corbeaux, ces femmes deux fois défuntes. Les chiens et les gardiens durent rester aux aguets. Mais le criminel n'agissait pas toutes les nuits et, parfois, les sentinelles perdaient de leur vigilance.